Le mofo grefy est une gourmandise malgache unique en son genre, unissant le meilleur de deux spécialités traditionnelles : le mofogasy et le ramanonaka. Ce met sucré-salé se déguste généralement au petit-déjeuner ou en encas, et ravit les papilles en combinant douceur sucrée et saveurs salées.
Dans la cuisine de Madagascar, le riz tient une place centrale et sert de base à de nombreux plats. Les mofo (qui signifie « pain » en malgache) sont justement des petits pains ou beignets à base de farine de riz cuits dans des moules spécifiques et vendus le matin dans les rues. Le mofo gasy et le ramanonaka en sont deux variantes très appréciées, l’un étant sucré et l’autre salé. Le mofo grefy, dont le nom évoque l’idée d’un « greffage » ou mélange, marie ces deux variantes en une seule recette originale. Avant de passer à la préparation, découvrons d’abord ces deux incontournables de la cuisine malgache.
Mofogasy et Ramanonaka : le sucré vs le salé malgache
Le mofogasy (ou mofo gasy) signifie littéralement « pain malgache ». C’est un petit pain rond à base de farine de riz, de sucre et de levure, cuit dans un moule en fonte sur les braises. Léger et légèrement sucré, il se savoure chaud au petit-déjeuner accompagné de café ou de thé. En dehors des Hauts-Plateaux, on le retrouve avec des variantes locales : par exemple sur la côte, la pâte est enrichie de lait de coco, donnant le mokary au coco, une version encore plus moelleuse et parfumée.
Traditionnellement, les vendeurs de rue utilisent un grand moule circulaire en aluminium appelé tavy pour en cuire plusieurs à la fois sur un feu de charbon. Le résultat : de petits gâteaux dorés, fluffys à l’intérieur, qui ressemblent à des pancakes épais et qu’on déguste généralement nature ou avec une touche de confiture.
De son côté, le ramanonaka est considéré comme la version salée du mofo gasy. Il s’agit d’une sorte de crêpe ou galette de riz salée et frite (souvent dans du saindoux ou de l’huile). La pâte est essentiellement composée de farine (ou semoule) de riz, d’eau et de sel, parfois fermentée pour développer un petit goût acidulé typique. On le cuit également dans un moule tavy, mais plus longuement et avec davantage d’huile que le mofo gasy, afin d’obtenir une texture bien cuite et légèrement croustillante sur les bords.
Le ramanonaka se consomme en-cas salé, souvent en accompagnement de plats comme le kitoza fumé (de fines lamelles de zébu séchées et grillées) ou d’autres mets traditionnels, mais il peut tout aussi bien se manger seul pour caler une petite faim.
Le mofo grefy vient réunir ces deux univers en un seul mets hybride. C’est un peu le « deux en un » des mofo malgaches : une préparation sucrée-salée qui combine la douceur du mofo gasy et le côté savoureux du ramanonaka. Il offre une expérience gustative originale, très appréciée de ceux qui n’arrivent pas à se décider entre sucré et salé au petit-déjeuner !

Tableau comparatif des spécialités mofo malgaches
Avant de réaliser la recette pas à pas du mofo grefy, résumons en un tableau les caractéristiques de ces différentes préparations malgaches à base de farine de riz :
Plat | Type | Ingrédients principaux | Consommation | Particularités |
Mofo grefy | Sucré et salé | Farine de riz, sucre, sel, huile (ou saindoux) | Petit-déjeuner, encas | Fusion sucré-salé (mélange de mofogasy et ramanonaka) |
Mofo gasy | Sucré | Farine de riz, sucre, levure (ou levain) | Petit-déjeuner (avec thé/café) | Pain/briochin de riz sucré, cuit en moule, légèrement fermenté |
Ramanonaka | Salé | Farine (ou semoule) de riz, eau, sel, huile | Encas salé, accompagnement | Galette de riz salée, plus grasse et dorée, goût un peu acidulé (fermentation) |
Comme on le voit, mofogasy et ramanonaka partagent la même base (farine de riz) mais s’opposent par le goût. Le mofo gasy intègre du sucre et un ferment (levure ou levain) qui lui donne une mie aérienne et douce, tandis que le ramanonaka est non sucré, salé, et parfois légèrement aigre en raison d’une fermentation de la pâte.
La cuisson du ramanonaka se fait généralement avec plus de matière grasse, ce qui lui confère une surface bien dorée et un extérieur plus croustillant que son cousin sucré. Mofo grefy combine ces deux approches en un seul produit : on y retrouve du sucre et du sel, avec une texture moelleuse à cœur et dorée à l’extérieur. C’est cette alliance étonnante que nous vous proposons de découvrir à travers la recette suivante.
Recette du mofo grefy pas à pas
Après ce tour d’horizon culturel, passons en cuisine pour préparer un délicieux mofo grefy maison. La recette peut sembler un peu technique puisqu’elle associe deux pâtes différentes, mais elle reste accessible avec un peu d’organisation. Pour reproduire au mieux la texture authentique, il est idéal d’avoir un moule à mofo gasy ou à défaut un moule à pancakes type aebleskiver. Si vous n’en avez pas, ne vous inquiétez pas : une poêle ordinaire fera l’affaire pour cuire de petites crêpes épaisses, le résultat sera tout aussi savoureux (seule la forme changera).

Ingrédients pour environ 6 à 8 mofo grefy
Base de farine de riz (bouillie) :
Cette étape permet d’épaissir la pâte et d’améliorer la texture finale.
- Farine de riz : 1 cuillère à soupe
- Eau : 2 tasses (environ 500 ml)
Pâte principale :
- Farine de riz : 600 ml (≈ 2 kapoaka, équivalent à ~250 g)
- Eau tiède : environ 250 ml à ajuster suffisamment pour obtenir une pâte ayant la consistance d’une pâte à crêpes
- Pour la partie sucrée : 3 cuillères à soupe de sucre (blanc ou roux)
- Pour la partie salée : 1 cuillère à soupe d’huile (chauffée) + 1/2 à 1 cuillère à café de sel
Remarque : traditionnellement, on ne met pas de levure dans le mofo grefy tel qu’il est présenté ici, la recette s’appuie sur la fermentation naturelle de la pâte de riz. Toutefois, si vous souhaitez une pâte qui lève plus et gagne en légèreté, vous pouvez ajouter 1 cuillère à café de levure boulangère sèche dans la partie sucrée comme pour un mofo gasy.
Variante de proportions (version personnelle) :
Si vous préférez travailler en poids plutôt qu’en volume, voici des proportions alternatives éprouvées pour environ 6 pièces :
- Pour la pâte salée (type ramanonaka) : 75 g de farine de riz + 75 g de farine de blé, 1 cuillère à café de sucre, 1/2 cuillère à café de sel, le tout mélangé à 40 cl d’eau bouillante. (Le mélange de deux farines donne une meilleure tenue et un croustillant agréable.)
- Pour la pâte sucrée (type mofo gasy) : 125 g de farine de riz, 80 g de sucre, 2 œufs, 20 à 35 cl d’eau tiède, 1 cuillère à café de levure boulangère. (Cette pâte est enrichie en œufs pour plus de moelleux – une touche personnelle qui s’écarte un peu de la recette traditionnelle.)
Préparation du mofo grefy
- Préparer la bouillie de riz : Dans une casserole, mélangez 1 c. à soupe de farine de riz avec 2 tasses d’eau. Faites chauffer à feu moyen en remuant constamment jusqu’à ce que le mélange épaississe légèrement, comme une bouillie fluide. Cette étape permet de prégélatiniser une partie de la farine, ce qui donnera une texture plus tendre aux mofo. Laissez tiédir quelques minutes.
- Préparer la pâte de base : Dans un grand bol, versez les 600 ml de farine de riz. Ajoutez progressivement la bouillie tiède tout en mélangeant. Incorporez ensuite suffisamment d’eau tiède pour obtenir une pâte homogène ayant la consistance d’une pâte à crêpe un peu épaisse. Astuce : Si la pâte vous semble grumeleuse, n’hésitez pas à la passer au mixeur plongeant ou au blender pour bien lisser le tout.
- Séparer en deux pâtes (sucrée et salée) : Répartissez la pâte de base dans deux saladiers à parts égales. Dans le premier bol, ajoutez le sucre pour la version sucrée et mélangez bien. Dans le second bol, ajoutez le sel puis l’huile chaude (chauffée au micro-ondes ou à la casserole) pour la version salée, et mélangez bien. Vous obtenez ainsi deux pâtes : l’une sucrée, l’autre salée mais de consistance similaire. Couvrez les deux récipients d’un linge propre et laissez reposer pendant 30 minutes à 1 heure à température ambiante. Ce temps de repos permet à la farine de riz de bien s’hydrater (et de fermenter légèrement si vous avez ajouté de la levure ou si vous prolongez le temps de repos), ce qui améliorera la saveur et la texture.
- Cuisson des mofo grefy : Chauffez votre moule à mofo gasy sur feu moyen. Si vous utilisez une poêle classique, faites-la chauffer comme pour des pancakes. Important : veillez à bien huiler les alvéoles du moule ou la surface de la poêle avant chaque fournée pour éviter que ça colle (le ramanonaka étant peu gras dans la pâte, il a tendance à attacher).
- Versez d’abord une petite quantité de pâte salée dans chaque alvéole (ou faites de petits disques de 5 cm de diamètre dans la poêle). Remplissez-les à moitié environ. Laissez cuire 1 minute jusqu’à ce que le dessous commence à prendre et à dorer légèrement.
- Ensuite, ajoutez par-dessus une couche de pâte sucrée; juste de quoi remplir le moule jusqu’au bord. La pâte sucrée va en partie se mélanger à la salée à la jonction, créant l’effet grefy (marbré sucré-salé), tout en laissant deux couches distinctes.
- Couvrez le moule (ou la poêle) pendant 1 à 2 minutes pour aider le dessus à cuire à la vapeur. Une fois que la base est bien dorée et que le dessus commence à figer, découvrez puis retournez délicatement chaque mofo grefy à l’aide d’une fourchette ou d’un pique en bois. Attention : la première face (salée) est un peu plus croustillante et fragile, allez-y doucement.
- Laissez cuire encore 1 à 2 minutes sur la deuxième face, jusqu’à ce qu’elle soit dorée également. Les mofo grefy doivent avoir une belle couleur brun-doré des deux côtés et être cuits à cœur (vous pouvez en ouvrir un pour vérifier que la pâte n’est plus humide à l’intérieur).
- Servir : Retirez les mofo grefy du moule et égouttez-les éventuellement sur du papier absorbant s’ils sont un peu huileux. Servez-les tant qu’ils sont chauds ou tièdes. C’est à ce moment qu’ils sont les plus savoureux. Le mofo grefy se déguste tel quel, sans accompagnement particulier. Vous pouvez toutefois le présenter avec du café malgache bien corsé ou du thé, comme il est d’usage au petit-déjeuner à Madagascar.

Mofo Grefy : conseils et variations
- Moule traditionnel : Si vous avez la chance de posséder un moule malgache ou un moule en fonte à mini-crêpes, utilisez-le sans hésiter pour une cuisson homogène. Sinon, une poêle à blinis, une poêle à poffertjes ou même un appareil à mini-donuts peuvent donner de bons résultats. L’important est de cuire à feu modéré pour que l’intérieur ait le temps de cuire sans brûler l’extérieur.
- Texture de la pâte : Une pâte de riz fermentée a naturellement un petit goût aigre doux. Si vous souhaitez accentuer ce côté « levain », vous pouvez préparer la veille la pâte de base avec une pincée de levure et la laisser fermenter toute la nuit. Le lendemain, divisez-la et ajoutez sucre et sel comme indiqué. Vous obtiendrez des mofo grefy au goût encore plus développé (proche de la recette originale du ramanonaka qui fermente et du mofo gasy au levain).
- Variantes gourmandes : Bien que la recette traditionnelle ne le prévoit pas, rien ne vous empêche d’aromatiser vos mofo grefy. Par exemple, ajoutez une gousse de vanille grattée ou quelques gouttes d’extrait de vanille dans la partie sucrée pour rappeler la vanille de Madagascar. De même, vous pouvez incorporer une pincée de cumin ou d’herbes dans la partie salée pour une touche personnalisée. Veillez juste à garder un bon équilibre et à ne pas trop charger en additifs, pour conserver la saveur caractéristique du riz fermenté.
En suivant ces étapes, vous devriez obtenir de superbes mofo grefy marbrés, moelleux et dorés à souhait. La clé est vraiment de maîtriser la cuisson pour que l’intérieur soit bien cuit sans que l’extérieur ne brûle, et d’ajuster la consistance de la pâte si besoin (elle ne doit être ni trop liquide, sinon les couches se mélangeront complètement ; ni trop épaisse, sinon les mofo seront durs et compacts).
Mofo Grefy en vidéo

Gaël Rakotovao, ingénieur d’études et d’exploitation puis diplômé de l’École Supérieure Polytechnique d’Antananarivo et actuellement CTO chez Mada Creative Agency, est également photographe passionné spécialisé dans les paysages, la culture et la cuisine malgache. Il cumule plus de 15 ans d’expérience en marketing digital, SEO, formation (SEO, photographie, crypto‑minage) et exerce aussi comme guide touristique certifié par le ministère du Tourisme autour de Madagascar.