Dans un coin discret du campus universitaire, loin des discours politiques et des studios de télévision, une équipe de chercheurs s’est attelée à relever un défi simple en apparence : allumer une lampe sans brancher de prise ni brûler un litre de carburant. À l’aide d’une poignée de métaux, d’un récipient et d’une solution saline, ces scientifiques sont parvenus à faire briller un puissant éclairage LED au moyen d’une réaction électrochimique mise au point localement.
« Nous avons voulu démontrer qu’avec des moyens accessibles, il est possible de produire de l’électricité propre et de l’utiliser immédiatement », explique un professeur de métallurgie de l’École Supérieure Polytechnique.
Devant la caméra, il détaille patiemment la composition de la batterie artisanale : une anode en métal (du zinc ou de l’aluminium), une cathode en matériau conducteur et de l’eau salée faisant office d’électrolyte. La réaction entre ces éléments libère des électrons qui parcourent un circuit, alimentant une lampe à diodes électroluminescentes (LED).
Une démonstration éclairante
Au cours de la séquence filmée, l’enseignant assemble les différents composants sur un plan de travail. Il immerge les plaques métalliques dans un bocal, raccorde des fils rouges et noirs à un bloc de LED, puis verse la solution saline. Quelques secondes suffisent pour que l’ampoule s’illumine intensément.
« Nous n’utilisons pas d’eau du robinet : la salinité est essentielle. De l’eau de mer suffit, mais on peut aussi préparer un électrolyte en dissolvant du sel de cuisine », ajoute-t-il.
La lumière qui jaillit prouve l’efficacité de la réaction et la capacité du dispositif à générer un courant stable pendant plusieurs heures.
Si la technologie n’est pas nouvelle l’innovation réside ici dans l’approche locale et low‑tech. Les métaux peuvent provenir de matériaux recyclés et l’électrolyte est renouvelé périodiquement en remplissant le récipient d’eau de mer ou d’une solution saline. La durée de vie dépend de l’oxydation des électrodes : lorsqu’elles sont saturées de corrosion, il suffit de les remplacer.
Un remède potentiel contre la pénurie d’électricité
À Madagascar, 80 % de la population vit en milieu rural et l’accès à l’électricité reste limité. Les groupes électrogènes au fioul sont onéreux et les installations solaires ne sont pas toujours abordables. Selon le chercheur, ce type de batterie pourrait offrir une alternative bon marché pour l’éclairage domestique ou l’alimentation de petits appareils électroniques :
- Matériaux disponibles: l’eau salée est gratuite, les métaux utilisés peuvent être récupérés ou achetés localement.
- Entretien simplifié: les utilisateurs n’ont qu’à vérifier l’état des électrodes et à renouveler l’électrolyte. Les pièces endommagées se remplacent facilement.
- Impact environnemental réduit: aucune combustion fossile, pas de fumées toxiques et un recyclage possible des composants oxydés.
Pour l’instant, la puissance générée reste limitée. Le dispositif convient pour alimenter un éclairage LED ou charger un téléphone portable, mais ne suffit pas à faire fonctionner un réfrigérateur ou une télévision. L’équipe espère néanmoins augmenter la capacité en multipliant les cellules ou en optimisant la surface des électrodes.
Les défis à relever
Cette expérience enthousiasmante ne doit pas masquer les difficultés. La maintenance requiert une certaine rigueur pour éviter l’oxydation prématurée des plaques et l’évaporation de l’électrolyte. La durabilité doit être évaluée : combien de cycles de charge et de décharge les métaux peuvent-ils supporter avant de se dégrader ? Enfin, la sécurité impose de manipuler ces solutions avec prudence, car une concentration en sel trop élevée peut corroder les équipements ou provoquer des fuites.
L’enseignant souligne cependant qu’il s’agit « d’un projet de recherche appliquée, ouvert à des améliorations constantes ».
Pour lui, l’important est d’initier un mouvement vers des solutions énergétiques adaptées aux réalités locales, en valorisant les ressources disponibles et en impliquant les communautés dans la production d’énergie.
Une lueur d’espoir pour l’électrification rurale
Même si cette batterie à l’eau salée ne remplacera pas les centrales électriques ou les réseaux d’acheminement de courant, elle offre une lueur d’espoir aux villages isolés. Pour un coût modique, il devient possible d’éclairer une maison, d’alimenter une radio ou de charger un téléphone. Chaque LED qui s’allume grâce à cette réaction chimique est une petite victoire contre l’obscurité et l’isolement.
Cette initiative rappelle que l’innovation ne vient pas toujours des grands laboratoires des pays industrialisés. Au contraire, c’est parfois en adaptant d’anciennes idées à des contextes nouveaux que l’on trouve des solutions concrètes aux problèmes quotidiens. Produire de l’électricité à partir de l’eau salée ne relève plus de la science-fiction : à Madagascar, cela devient une réalité tangible et prometteuse.
Vidéo : De l’électricité avec de l’eau salée, l’exploit de ces chercheurs malagasy !
Etudiant en Master II en biochimie, je suis passionné par les voyages et les technologies de l’information et de la communication. En dehors de mes études, je travaille en tant que rédacteur, traducteur et intégrateur. Je fais également un peu de community management.
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