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Madagascar investit 7 millions de dollars dans la protection côtière pour lutter contre le changement climatique

Sur la côte malgache, l’érosion mange chaque année plusieurs mètres de plages et les cyclones gagnent en violence. Pour inverser la tendance, le gouvernement vient de lancer un programme de 7,1 millions de dollars baptisé « Scaling Up Ecosystem-Based Adaptation for Coastal Areas in Madagascar ». Porté par le ministère de l’Environnement avec l’appui du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et un co-financement additionnel de 27 millions USD, il s’agit de l’un des projets d’adaptation fondés sur la nature les plus ambitieux du continent africain.

Selon les projections officielles, plus de 75 % des Malgaches vivent aujourd’hui à proximité immédiate de la mer. La montée du niveau des océans, l’intrusion saline dans les nappes phréatiques et la multiplication des tempêtes menacent directement leurs habitations, leurs terres agricoles et leurs sources de revenus.

 

Un projet d’adaptation fondé sur la nature (EbA)

Le cœur de la stratégie repose sur l’Ecosystem-based Adaptation (EbA) : plutôt que de miser uniquement sur des digues de béton, Madagascar choisit de restaurer les défenses naturelles du littoral.

Les objectifs opérationnels étant :

  • Restaurer 3 000 ha de mangroves et de forêts côtières pour amortir les vagues et stocker du carbone.
  • Réhabiliter 2 000 ha de bassins versants dégradés pour limiter l’érosion et protéger l’eau douce.
  • Déployer des actions dans quatre régions pilotes : Boeny, Menabe, Diana et Atsimo-Atsinanana.
  • Créer 20 entreprises éco-systémiques (pêche durable, aquaculture, apiculture, écotourisme, agriculture pluviale), avec un accent fort sur l’emploi des femmes et des jeunes.
  • Bénéficier directement à près de 100 000 personnes tout en inspirant une feuille de route nationale de l’EbA.

 

Mangroves, forêts et économie bleue : la première ligne de défense

Les mangroves jouent un triple rôle : bouclier naturel contre les ondes de tempête, pouponnière halieutique essentielle à la pêche artisanale et puits de carbone quatre fois plus efficace qu’une forêt terrestre. Or plusieurs décennies de coupe de bois et de surpêche ont fragilisé ces écosystèmes. En replantant des palétuviers et en ré-enracinant les dunes littorales, le projet entend réduire l’énergie des vagues de 30 % et diminuer l’érosion côtière de 25 % à l’horizon 2030.

« Restaurer les mangroves, c’est protéger le littoral, soutenir la pêche, créer des puits de carbone et préserver des sites de nidification pour des espèces rares », résume Hahitantsoa Tokinirina Razafimahefa, secrétaire général du ministère malgache de l’Environnement.

Mangroves sur la plage
Mangroves sur la plage

 

Quatre régions pilotes, 100 000 Malgaches en première ligne

  • Boeny (nord-ouest) : célèbre pour le parc de la Baie de Baly, mais exposée à l’envasement.
  • Menabe (ouest) : berceau des tsingy et des baobabs, déjà touchée par la salinisation des rizières.
  • Diana (extrême nord) : front touristique menacé par la multiplication des cyclones.
  • Atsimo Atsinanana (sud-est) : zone où l’érosion emporte chaque année des villages entiers.

Dans chacune de ces régions, des comités de gestion côtière associeront collectivités, ONG et universités pour suivre la reforestation, former les pêcheurs à des techniques sélectives et impliquer les femmes dans les coopératives d’algoculture.

 

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Une dynamique économique au service du climat

Outre les plantations, 20 entreprises EbA recevront des kits solaires, des équipements de transformation ou un accès facilité au micro-crédit. L’idée est de diversifier les revenus et de réduire la pression sur les ressources marines : quand un village gagne de l’argent grâce au miel de mangrove ou au tourisme ornithologique, il protège spontanément les palétuviers.

Le PNUE insiste : « Ce projet va renforcer la gouvernance locale de la zone côtière, mais il servira surtout de modèle pour une stratégie nationale d’EbA dans les autres régions vulnérables du pays » (Paz Lopez-Rey, PNUE).

Très belle plage de Madagascar

Au-delà de Madagascar : un test grandeur nature pour l’Afrique

Madagascar n’est pas seul. Le continent africain a besoin de plus de 100 milliards USD par an rien que pour l’adaptation, d’après un rapport 2023 de la Banque africaine de développement, alors que les flux réels restent très en-deçà.

Le même groupe estime dans son African Economic Outlook que 2,6 à 2,8 milliards de dollars seront nécessaires d’ici 2030 pour respecter les engagements climatiques actuels. Dans ce contexte, le financement de 7 millions USD paraît modeste, mais il démontre qu’une coalition État-PNUE-GEF-communautés peut générer des solutions concrètes et réplicables.

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